Les intérêts et les limites des tests physiques dans le processus d’entrainement d’un(e) cycliste

Sommaire

Grand Prix cycliste féminin de Segré-en-Anjou Bleu 2021 – Photo personnelle

1.      Les différents types de tests physiques

Il est possible de définir un test physique par le fait d’effectuer un exercice physique dans le but de connaître le plus fidèlement possible le niveau physique d’un athlète dans un sport donné et sur un temps donné.

Concernant le cyclisme traditionnel, ces tests peuvent être effectués sur un vélo ou sur un home-trainer. Par exemple, il possible de mesurer et d’avoir un aperçu correct du potentiel d’un athlète à la résistance aux lactates avec test Wingate sur home-trainer intelligent. Ce test consiste à faire sprinter l’athlète pendant 30 secondes à une puissance donnée.

Sur le vélo, il est possible de faire un test de 5 minutes le plus rapidement possible pour avoir une idée correcte et fiable de la puissance maximale aérobie avec un capteur de puissance ou pour avoir la fréquence cardiaque (FC) moyenne de l’athlète à cette intensité et sa FC maximale.

Il est possible de créer de nombreux tests pour mesurer une aptitude. Par exemple, si un coureur souhaite progresser en montée, il est possible qu’il fasse un test qui correspondrait à monter le plus rapidement possible une côte donnée et de relever à la fin du test, sa vitesse moyenne dans la côte, sa fréquence cardiaque moyenne et sa puissance moyenne sur cet effort s’il a un capteur de puissance.

Mais attention, pour pouvoir utiliser un test dans le cadre d’un processus d’entrainement sérieux, il est nécessaire que celui-ci soit reproductible dans le temps et l’espace. Ainsi, il sera nécessaire d’utiliser le même matériel (cadre, roues, casque, capteur de puissance…) et utiliser le même parcours à chaque fois qu’un type de test est effectué.

En reprenant l’exemple précédent d’un test en côte, l’athlète devra donc monter la même côte, avec le même cadre, les mêmes roues et un casque similaire à celui utiliser lors du premier test. Il serait bien aussi de faire le test lorsque la météo est similaire, même si cela est plus difficile à mettre en place.

Ainsi, effectuer un test physique dans le cadre d’un processus d’entrainement demande un peu de mise en place et de réflexion mais cette démarche a de nombreux intérêts à court et plus long terme.

2.      Les intérêts des tests physiques dans le processus d’entrainement

A court terme, effectuer un test dans le cadre de l’entrainement permet de définir les zones d’intensité ou de travail. Cette définition et hiérarchisation des zones de travail sont nécessaires dans le cadre d’un entrainement sérieux et cohérent. Cela permet de ne pas s’entrainer à l’aveugle et de ne pas perdre de temps et d’énergie inutilement. Il permet aussi de comprendre qu’il est nécessaire de varier les intensités d’exercice dans la cadre d’un entrainement de bonne facture.

Cela permet aussi de comprendre que les périodes de récupération et de repos qui sont primordiales pour progresser à court et long terme. Le corps a besoin de phase de repos et de récupération pour assimiler la charge de d’entrainement. Il en découle deux principes cardinaux de l’entrainement cycliste : les principes de périodicité et de variation de la charge d’entrainement. 

De plus, effectuer un test permet à l’athlète et à son entraineur, s’il en a un, d’avoir une image du niveau de l’athlète et de son potentiel. Cette image n’est pas parfaite mais elle permet d’être un point de départ pour élaborer un processus d’entrainement cohérent et soutenable dans la durée.

A partir d’un ou plusieurs tests, il est aussi possible de savoir quelles qualités ou lacunes physiques de l’athlète, il est nécessaire de travailler en priorité. Ces priorités sont aussi à définir en fonction des objectifs de l’athlète sur la période donnée (progresser contre-la-montre, s’essayer à une nouvelle pratique, débuter la compétition cycliste…).

A titre d’exemple, si un athlète veut progresser contre-la-montre mais que son test pour mesurer ses capacités au seuil anaérobie montre que ce dernier a du mal à maintenir son effort sur la durée du test, il serait intéressant de travailler les capacités d’endurance de ce cycliste et de travailler ses capacités au seuil anaérobie sur la durée plutôt que de vouloir augmenter ses capacités (ou sa puissance) intrinsèques à cette intensité donnée. Ici, le but sera donc de permettre à l’athlète de soutenir son effort au seuil plus longtemps.

A moyen terme, la mise en place de tests réguliers permet de mesurer les progrès d’un athlète sur différentes thématiques d’entrainement (endurance, explosivité…). A mon sens c’est le réel intérêt des tests dans un processus d’entrainement. Les tests ont donc une dimension d’évaluation primordiale dans ce processus. Les résultats de ces derniers pourront donc renseigner sur l’efficacité et l’efficience du processus d’entrainement en mesurant les progrès de l’athlète ou au contraire l’inefficacité de ce processus. Il permet dans ce cas de réorienter ce dernier pour qu’il retrouve son efficacité et son efficience.

Les tests permettent donc en cas de progrès de rassurer et de motiver l’athlète et l’entraineur dans le cadre de leur relation d’entrainement.

En conséquence, ces tests permettent d’individualiser le processus d’entrainement. Cette individualisation est un principe incontournable de l’entrainement cycliste. Chaque processus d’entrainement est différent d’un athlète à l’autre.

Par ailleurs à long terme, la passation régulière tests physiques permet de suivre l’évolution de l’athlète, ses progrès sur certains types d’effort. Elle permet de cerner son profil avec l’aide d’autres outils tels que le cardiofréquencemètre, le PPR (Profil Puissance Record) qui compile les meilleures puissances développées par l’athlète sur un grand nombre de durée (d’une seconde à plusieurs heures) ect.

Pour résumer, les tests effectués permettent de mesurer l’efficience et l’efficacité recherchées d’un processus d’entrainement. Ils permettent une matérialisation des progrès ou non et donc permettent de réajuster les entrainements si nécessaire. Ces tests effectués régulièrement permettent donc une réflexion et une prise de recul primordiale dans tout processus d’entrainement.

Pour autant, il serait inadéquat de n’utiliser que les résultats de ces tests comme outil d’entrainement et de mesure des progrès de l’athlète. Ils ne doivent en aucun cas être l’alpha et l’oméga de la conduite du processus d’entrainement.

3.      Les limites des tests physiques dans le processus d’entrainement

Les tests physiques sont en effet importants mais ils ne doivent pas être les seuls éléments d’évaluation de l’efficacité et l’efficience d’un entrainement. Ce sont des outils à intégrer à la réflexion générale sur le processus d’entrainement mais ce ne sont pas les seuls.

De plus, Il faut toujours garder à l’esprit qu’un test physique est une photographie à un instant T mais en aucun cas une « vérité absolue » sur le potentiel de l’athlète. En d’autres termes, il ne faut pas résumer le potentiel cycliste d’un athlète à ses tests.

En effet, il y a d’autres paramètres à prendre en compte comme notamment les habilités techniques de l’athlète, sa motivation, sa capacité à gérer le stress à l’entrainement et plus encore lors de la compétition. Il est aussi nécessaire de prendre en compte l’environnement de l’athlète (capacités du club à l’encadrer, personnes proches, disponibilités horaires et contraintes personnelles incompressibles…).

Il est aussi nécessaire d’éviter de comparer les tests avec ceux de ses partenaires d’entrainement ou ses adversaires en compétition. En effet, ces coureurs peuvent avoir des objectifs différents et donc des résultats de tests différents sans pour autant dire que l’un est meilleur qu’un autre. De plus, il est toujours nécessaire, dans le cas d’un test effectué avec un capteur de puissance, de rapporter le résultat au poids de l’athlète. Sans connaitre cette variable, il est compliqué de tirer des enseignements intéressants des tests effectués avec un capteur de puissance. Sans cette variable, il est impossible de faire une comparaison cohérente des tests des différents coureurs.

De ce fait, Il faut savoir prendre du recul par rapport aux données de ces tests. Ils ne représentent qu’une image à un instant T des capacités a priori de l’athlète. Ces tests sont à mon sens nécessaires mais doivent être utilisés avec d’autres variables d’entrainement.   

En outre, les tests et les zones d’entrainement n’ont pas forcément pour but de mesurer parfaitement le potentiel physiologique d’un athlète car elles n’ont pas toujours une dimension physiologique (voir le débat sur les différents seuils et leur réalité physiologique) mais ils permettent de créer des repères stables et fiables de progression et de formalisation des progrès de l’athlète dans le temps. 

Par ailleurs, Il est nécessaire que les tests effectués soient les plus proches de la pratique effectuée. Ainsi, les tests effectués sur le vélo sont à privilégier même si des tests sur home-trainer sont intéressants à divers points de vue. Il est d’ailleurs impossible d’utiliser un test effectué sur home-trainer pour définir les zones d’entrainement sur le vélo. Les résultats sont trop différents. Il est nécessaire de faire des tests sur home-trainer et sur route.

Enfin, il faut éviter de faire trop fréquemment des tests surtout sur home-trainer car ce sont des efforts physiques très violents. Ils peuvent donc devenir épuisants pour l’athlète. Ils peuvent engendrer un stress élevé pour des coureurs surtout relativement jeunes.

En guise de conclusion, les tests physiques sont primordiaux dans un processus d’entrainement cohérent et sérieux. Pour autant, ils ne doivent pas être les seuls paramètres de suivi de la performance et de la progression d’un athlète dans le temps. Le rôle de l’entraineur est d’utiliser les résultats de ces tests en lien avec d’autres données d’entrainement. 

Antoine Chevalier